La menteuse et la ville, Ayelet Gundar-Goshen

la menteuse et la villeL’adolescence n’est pas une sinécure pour cette jeune Israélienne du XXIe siècle : les kilos en trop, l’acné, pas assez jolie, pas assez drôle, pas assez intéressante… Et en plus sa meilleure copine l’a lâchée pour la bande des cools du lycée ! Pendant cet été ennuyeux à vendre des glaces dans l’indifférence générale, Nymphéa rêve du regard d’un garçon qui métamorphosera sa vie comme dans une comédie romantique. A la place, c’est une ancienne star de télé crochet qui se pointe au comptoir et l’insulte pour évacuer la frustration de ses projets de retour ratés. Et va commettre l’erreur de sa vie en courant après la jeune fille tandis qu’elle part cacher ses larmes aux toilettes. Hurlant de désespoir, Nymphéa alerte le quartier qui saute à des conclusions évidentes : tentative de viol sur mineure. Au lieu de la démentir, elle va laisser gonfler la rumeur jusqu’au point de non-retour. Téléportée sur le devant de la scène, Nymphéa porte sa victimisation comme un charme et réalise tous ses rêves : elle devient jolie, intéressante et trouve même un petit-ami. Mais la culpabilité la ronge, et Ceux-qui-savent (ou croient savoir) risquent de la faire tomber violemment de son piédestal.

Avec un humour grinçant et une candeur touchante, ce roman d’apprentissage offre une perspective différente sur les affaires de faux témoignages et les retombées dramatiques pour les accusés comme les accusateurs. On n’a pitié de personne (surtout pas de la victime), et la justice et la vérité prennent un tout autre sens. Mais surtout, l’auteure nous renvoie à notre propre image, celle d’une personne lambda à qui sa vie ne lui suffit pas et qui, au lieu de prendre de vrais risques, s’invente une autre vie pour plaire, faire plaisir ou simplement tuer l’ennui. Les conséquences peuvent être terribles, cependant ce sont elles qui font tourner le monde, pour le meilleur et pour le pire.

Qui n’a jamais menti pour embellir son existence, Nymphéa pourrait vous en apprendre une ou deux… Quant au reste de l’humanité, ces beaux tissus de mensonges sont aussi délicieux et coupables qu’un café-clope à la terrasse d’un café. Délectez-vous !

Editions Presses de la Cité (2019)

Traduit de l’hébreu par Laurence Sendrowicz

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